L'ouvrage de notre patrimoine
Ce livre de belle facture a été conçu en plusieurs volets par 4 auteurs:
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Gérard Munch, + , Docteur en Histoire médiévale,
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Charles Tripp, +, professeur de Musique à Belfort et président fondateur de "Flûtes du monde"
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Marc Schaefer, ancien professeur d'orgue au CNR de Strasbourg et expert de la DRAC pour les orgues
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et Pierre Pfister, compositeur et organiste titulaire de l'orgue de Dole
sous la coordination d’Etienne Doppler, président de l'APOS..
Le premier volet, rédigé par Gérard Munch et consacré à l’histoire du village, porte notamment un regard sur la cour domaniale qui y a existé jusqu’à la révolution, ainsi que sur les deux édifices cultuels classés dans la paroisse, la chapelle Saint-Brice et l’ancienne église Saint-Martin-des-champs. Elle fait également une bonne place à la construction mouvementée de la nouvelle église, au centre du village, dans laquelle a été installé l’orgue CALLINET en 1843. Cloches, organistes et chorale complètent ce volet.
Le second, travail manuscrit de Charles Tripp, porte sur l'histoire de l'orgue historique Callinet d'Oltingue, suivi d'une monographie de cet instrument de référence, détaillée par Marc Schaefer. Il nous fait admirer sa merveilleuse facture et, en particulier, nous dévoile les fameux devis des Callinet et une information inédite sur les non moins fameuses anches…
Enfin, Pierre Pfister nous permet de découvrir la réalité historique de la période de construction de l’orgue, ainsi que le riche environnement musical de cette période en Alsace.
Il est possible d'acquérir ce bel ouvrage au prix de 22 euros l’exemplaire,
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soit sur place, à Oltingue, le jour du Concert du Patrimoine
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soit en envoyant un courriel à partir du site https://apos.asso-web.com/




L’église Saint-Martin des champs
L’ancienne église datant du XIVème siècle, est classée monument historique. Des fouilles effectuées en 1989 et 1990 ont révélées des tombes anciennes dans la nef dont quelques-unes ont été mises en valeur.
Construction
Le clocher et la nef de cette église ont été construits au XIIIème Siècle. Au XVème, les premiers remaniements ont lieu : on ajoute la sacristie, ce qui implique le percement d’une porte et la condamnation partielle de la fenêtre au-dessus de cette porte. On met également en place une custode et les peintures murales sont piquetées afin d’être recouvertes d’un enduit.
D’après des actes de la fin du XVIIème siècle, des travaux de restauration sont nécessaires. On remplace le plafond du chœur en croisée d’ogives par un plafond en plâtre sur lattes et corniches. La fenêtre au-dessus de la porte de la sacristie est entièrement bouchée ainsi que les niches du mur sud.
En 1868 dernière restauration : les ouvertures vitrées du chœur et de la nef sont remplacées par des fenêtres de style néogothique à la mode du XIXème siècle. Le plafond est remplacé par l’actuelle voûte sur croisée d’ogives. La porte d’entrée sur le mur ouest est agrandie et munie d’un porche sur poteaux métalliques.
En automne 1989, des travaux sont entrepris pour établir un vide sanitaire et un réarrangement intérieur. C’était l’occasion pour R.SCHWEITZER de faire la première fouille archéologique depuis la construction de l’église.
Bâtiments antérieurs
On peut dissocier quatre phases d’aménagement de cet emplacement :
Phase 1 : Celle-ci se matérialise par les restes d’une tombe maçonnée et des reliquats de tombes en pleine terre.
Phase 2 : Petit édifice de 6,40m sur 3,4 situé du côté droit de la nef, à partir du mur derrière l’autel jusqu’à 1,50 m environ de la tombe maçonnée.
Phase 3 : Nouvel édifice ayant les mêmes dimensions et situé au même endroit que le précédent mais avec un léger changement d’orientation.
Phase 4 : La chapelle de la phase 3 est probablement affectée au rôle de chœur et agrandissement du lieu de culte.
Phase 5 : A la fin du XIIIème siècle, on démolit l’ancienne église et reconstruit au même emplacement l’édifice actuel.
D’après les éléments recueillis au cours des travaux, c’est dès le VIIème siècle qu’un petit édifice maçonné était érigé à cet endroit.
Tombes
Le sarcophage est taillé dans du calcaire jurassique. La tombe maçonnée de style gallo-romain, est construite en pierres calcaires et tuiles romaines. Elle contenait le squelette (qui s’y trouve encore) et les pieds de celui-ci reposaient sur les ossements de cinq autres individus.
Les dépôts funéraires recueillis sur cette dernière inhumation : un tesson carolingien, une boucle de ceinture de fer, un denier de Charles le Chauve frappé vers 840 à STRASBOURG.
Le caisson de pierre : La tombe contenait le squelette du premier défunt et également les restes d’ossements de trente squelettes. Cette tombe servait probablement d’ossuaire.
D’autres tombes en pleine terre ont été également découvertes. L’existence de ces dernières et de tombes somptuaires (décrites plus haut) révèle une différence de rang social entre les personnes qui ont été inhumées à cet endroit.
Dans cette enceinte se trouve également un morceau de baptistère provenant probablement de l’église de la phase 4.
Chœur
A droite deux ouvertures : La plus grande pourrait avoir été “l’armorium” servant au rangement des objets du culte avant la construction de la sacristie.
La plus petite a pu servir de crédence (endroit où l’on dépose les burettes).
A gauche au-dessus de la porte de la sacristie : fenêtre d’origine (était un peu plus haute).
La surface blanche sans fresque était l’emplacement de la custode.
Fresques
Il y avait deux couches de fresques dans le chœur :
De la première, il ne reste que quelques vestiges.
La deuxième date de 1350 environ… Son auteur a fait preuve d’un grand talent et d’une grande finesse si on observe l’allure des corps et le tracé des visages. C’est en somme une bande dessinée retraçant des scènes de l’ancien mais essentiellement du nouveau testament pour l’instruction de la population qui est analphabète. Des fresques semblables existent encore dans d’autres églises d’ALSACE et de la SUISSE voisine.
Constructeur
Comme il est d’usage en ce temps :
La tour avec le chœur a été construite par le décimateur du lieu, ici l’abbaye de MURBACH (près de GUEBWILLER). La nef est généralement construite par la population.
Sources : Plaquette : Découvrir le Sundgau : OLTINGUE (en vente au “musée paysan”) rédigée PAR R. SCHWEITZER, Jean ZIMMERMANN, Isabelle RUETSCH, G. MUNCH, éditée par la SOCIETE D’HISTOIRE SUNDGAUVIENNE sous la direction de Mme G. CLAERRSTAMM).
Restauration
Dans le cadre des travaux de restauration extérieurs menés début 2018, le mur sud de la nef a réservé une surprise de taille aux « restaurateurs » : 2 fresques extérieures entremêlées, l’une noire (16ème ?) et l’autre à dominante rouge (18ème), d’environ 2m sur 5.
Elles pourraient représenter la ville de Bâle au bord du Rhin ; des recherches sont en cours.
Il s’agit, selon l’architecte du patrimoine Jean-Luc Isner, de la seule fresque sur une façade extérieure d’église en Alsace !
L’église paroissiale Saint-Martin
La décision de construire un nouvel édifice religieux remonte au 11 août 1824 car la population locale avait doublé depuis la guerre de 30 ans. L’église-mère Saint-Martin ne suffisait plus; de plus elle était trop éloignée (1 kilomètre), et était une source d’inconvénients en cas d’intempéries (surtout l’hiver) et une entrave au principe sacro-saint de l’église au milieu du village.
Antoine Vogelweid, huissier à FERRETTE, qui faisait alors ses premières expériences en matière de construction, vint offrir ses services pour lever les difficultés et diriger avec un empressement louable et désintéressé les démarches pour obtenir l’autorisation de bâtir. Il fallait évidemment réunir l’argent nécessaire pour couvrir les frais de construction se montant à la somme de 47.645,89 francs. Les trois premières ventes de bois ont produit 28.340 francs.
Le 15 décembre 1827, le conseil municipal demande l’autorisation d’employer deux cents chênes supplémentaires pour l’achèvement de l’église. La vente produit seulement 13.000 francs.
Entre temps le projet fut adjugé le 3 août 1826 à Altkirch, à Antoine Xavier Desgrandchamps, notaire à FERRETTE, sous le cautionnement et avec l’association de Jean Keigerlé, maçon à Folgensbourg. Plans et devis dressés par l’architecte Wagner, avaient été vérifiés par le conseil des bâtiments civils à Paris et approuvés par le ministre de l’Intérieur.
Le 21 septembre 1831, l’église est ouverte pour la première fois à la célébration du culte avec un retard de 3 ans, 2 mois et 20 Jours.
L’église paroissiale aurait dû être parachevée au 1er septembre 1828.
Elle ne le sera véritablement qu’en 1843 après de nombreux problèmes et procès.
Depuis la construction, la paroisse a fait de méritoires efforts pour entretenir l’édifice.
1925 a été l’année d’une grande toilette. Il a fallu remanier entièrement la toiture, réparer la flèche du clocher … A l’intérieur de la grande nef, plafond, corniche, panneaux … ont été démolis et le tout refait à neuf.
La restauration de 1981 a porté essentiellement sur l’intérieur de l’église (peinture) et l’isolation du plafond. Cette cure de rajeunissement s’est chiffrée à 218623 F.
En 2000, la commune a fait procéder à une « toilette » extérieure se montant à 2.7 millions de F.
Le mobilier actuel présente un ensemble très homogène
Autels : la commune passe contrat le 29 janvier 1882 avec le sculpteur et fabricant d’autels Théophile Klem de Colmar pour la fourniture d’un maître-autel, quatre autels secondaires et de cinq statues. Ils seront en bois de chêne de la meilleure qualité. Les figures et ornements devront être finement exécutés en bois de tilleul puis peints et dorés. Le fabricant percevra 12 200 marks au total.
Le maître-autel a un tabernacle néo-classique, surmonté d’un dais d’exposition. Les statues de saint Blaise et saint Marc sont posées dans les niches.
Les autels secondaires du chœur sont dédiés à saint Joseph à droite et sainte Catherine à gauche, ceux de la nef au Sacré-Cœur à droite et à la Vierge à gauche.
Statue remarquable : sur l’autel dédié à la Vierge, on trouve une statue provenant de l’ancienne église paroissiale (St-Martin-des-Champs). Cette vierge en bois de tilleul, est peut-être issue d’un atelier bâlois ou colmarien, datant d’après le style des années 1520.
Elle est reconnue comme l’une des plus belles de la région “nord-alpine; sa fine chevelure est caractéristique du gothique tardif.
Autres œuvres du sculpteur colmarien, Théophile Klem : deux confessionnaux en beau bois de chêne, les montants des bancs ainsi que les fonts baptismaux en grès fin de Phalsbourg. Elles sont livrées en avril 1893 pour une somme totale de 3144 marks.
Peintures : les peintures du plafond et du chœur sont de Louis Lichtenauer (Colmar, 1924).
Chemin de croix : il comporte exceptionnellement quinze stations, dont la dernière montre Sainte-Hélène qui présente la croix retrouvée.
La chaire à prêcher : en bois polychrome et stuc, elle est l’œuvre du sculpteur (ébéniste) Joseph Dreyer d’Altkirch. Elle a été mise en place en 1877.
Cloches : parmi les cinq cloches trouvant actuellement place dans le clocher, celle de 1553, autrefois à l’église Saint-Martin des Champs, a un parcours remarquable : on la croyait perdue, victime des réquisitions allemandes en 1917; elle est heureusement revenue en 2019 de Francfort où on l’avait entreposée, en attendant d’en faire des canons.
La dernière cloche installée dans le clocher l’a été en 1964.
Horloges : placée dans le clocher vers 1843, la première horloge présente déjà des signes de défaillance en 1860. Une nouvelle horloge fut mise en place en mai 1861 par Urban Adam, horloger-constructeur de COLMAR. Elle a coûté 4000 F.
Le contrat de construction avait été signé le 20 septembre 1860 et approuvé par le préfet le 28 novembre suivant. Le constructeur octroyait dix ans de garantie à partir du jour de la réception officielle de l’horloge. Celle-ci sonnera les quatre quarts et les heures, et sera composée de trois corps de rouages. On préconise aussi dans le contrat que cette horloge doit être plus grande et plus forte que celle récemment placée à HIRSINGUE, en raison de la pesanteur des cloches.
Depuis, son aiguille ponctue inlassablement les heures gaies et graves du village. Pendant plus d’un siècle, le sacristain la remontait manuellement. En 1957, deux moteurs électriques (un pour les quarts et l’autre pour les heures) installés par l’entreprise Ungler de COLMAR, ont remplacé la main de l’homme. Néanmoins une surveillance permanente est nécessaire.
L’orgue historique Callinet, bien sûr, immeuble par destination car il s’agit d’un bien mobilier « attaché » à l’église.
Voire sa description détaillée ci-après.
Les orgues historiques Callinet
Les travaux de reconstruction de l’avant-corps de l’église Saint-Martin, étant à peine achevés, les habitants de la commune, voulurent avoir leur orgues.
Au début de l’été 1842, le maire François Joseph KUENTZ pris contact avec les frères CALLINET de ROUFFACH à ce sujet.
Ceux-ci rédigèrent à la date du 21 août 1842 un devis se montant à 10.173 Fr. que le conseil adopta le 10 novembre 1842 en ces termes : « Vu ce dit devis et le plan rédigé par les dits facteurs, le conseil délibère. Considérant – Que le produit des coupes extraordinaires de 1842 couvrira au-delà les dépenses qui restent à solder. Est d’avis – Que le projet d’accord qui sera fait entre nous et les sieurs Callinet soit passé pour être soumis à l’approbation de M. le Préfet – Que le prix de 10 000 francs, stipulé dans l’accord sera payé aux sieurs Callinet … ».
Le traité fut signé le 20 novembre 1842 au prix de 10.000 Fr., payable en 4 termes.
(Les comptes communaux mentionnent des paiements échelonnés sur 8 ans de 1843 – 1851).
Le 31 janvier 1843, Ministère de l’Intérieur, préfet et sous-préfet avaient tous donné leur approbation.
D’après les archives de la commune, l’orgue est l’ouvrage de l’aîné, Joseph CALLINET, même si, après leur séparation en octobre 1843, la créance a été cédée à Claude Ignace (lettre du 30 novembre 1843).
La composition de l’orgue, intégralement d’origine et conforme au devis initial (sauf les tuyaux de façade du grand orgue, victime des réquisitions de 1917), est la suivante :
- Grand Orgue de 54 notes et 13 jeux
- Positif de dos de 54 notes et 7 jeux
- Pédalier de 25 notes et 7 jeux.
Les 2 jeux à anches libres (Ophicleide 16 à la pédale et Basson 8 au positif) représentent une des particularités de cet orgue.
Considérant l’ensemble des jeux d’anches de l’orgue d’Oltingue, Pie Meyer – Siat, docteur de l’université de Strasbourg, a écrit, dans sa thèse sur les Callinet : « Ce sont les meilleures anches Callinet d’Alsace »
Citons encore P.Meyer – Siat qui concluait: « Voilà un très bel instrument … qui mérite tout notre respect. On ne peut que féliciter les autorités de la commune de n’avoir pas permis de dégradations ».
Et, en effet, l’orgue d’Oltingue a subi peu d’interventions comme le montre la chronologie qui suit :
- en Juin 1874, Ferdinand HABERTHÜR, accorda l’instrument pour une somme de 480 Fr. Ont n’oubliera pas l’aide du souffleur qui lui perçut une somme de 20 Fr. pour avoir pendant 10 jours, entraîné le soufflet, car jouer de l’orgue (avant l’avènement de l’électricité) ne ce concevait pas sans souffleur d’orgue.
- en 1876 l’instrument est assuré pour une valeur de 5000 francs autant que le bâtiment de service dépendant du presbytère.
- en octobre 1917, l’orgue est dépouillé des tuyaux de montre par les forces Allemandes, ils sont remplacés en juillet 1927 par une façade en zinc.
- en 1925, l’orgue échappe de peu à la destruction, lors de la grande toilette de l’église paroissiale : le projet de la maison Roethinger avait même été retenue pour un nouvel orgue (Umbau der Kirchenorgel) mais, heureusement, le 11 février 1925, le conseil délibéra pour le réparation de l’église … « ohne neue Orgel » ! Seul le moteur électrique de soufflerie fut mis en place.
- en 1941, Georges SCHWENKEDEL procéda à un nettoyage de l’instrument, sans modifications.
- en 1968, un tournant dans la vie de l’orgue, car dès l’arrivé au village de l’abbé Etienne BILGER en 1958 les choses vont changer radicalement; très vite il se soucie de la bonne santé de cet instrument, qui va bénéficier des soins de facteurs experts comme P. HUGUIN, E. SATTLER de STRASBOURG et plus près de nous G. KERN.
- en 1973, par arrêté du 28 mai, le ministre des affaires culturelles a classé l’ORGUE CALLINET d’OLTINGUE MONUMENT HISTORIQUE.
- en 1978 Gaston KERN reconstitua la façade d’origine en prenant les tailles sur le CALLINET de MOLLAU, qui avait gardé la sienne.
- en 2017, la Manufacture d'Orgues Blumenroeder de Haguenau procède au relevage (nettoyage et révision) de l’orgue.
Depuis 1966, l’orgue historique Callinet d’Oltingue a vécu de nombreuses activités de concert (avec des invités prestigieux tels que Michel Chapuis, André Isoir, Francis Chapelet …), d’enregistrement radiophoniques (France Culture, Hilversum …) ou de disques (dont celui de Xavier Darasse en 1975 interprétant des œuvres de CPE Bach, chez Arion).
Depuis 1988, tous les ans, le dernier dimanche du mois de septembre, l’APOS (Association du Patrimoine Oltingue Sundgau) organise le Concert du Patrimoine promouvoir cet orgue historique des Frères Callinet.
Le dernier artiste invité a été François Espinasse, professeur d’orgue au CNSM de Lyon, organiste co-titulaire de St-Séverin à Paris et de l’orgue de la Chapelle Royale du Château de Versailles.